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Le vent se lève

Passion et reconnaissance

Réalisateur :

mercredi 5 mars 2014, par Richard

Et voilà, Miyazaki a livré son dernier film ! Il a choisi pour cela de revenir à ses premières amours : l’aviation et... l’amour ! Il décide ainsi de raconter le parcours de Jirō Horikoshi, ingénieur japonais en aéronautique, qui conçu le chasseur bombardier Mitsubishi.

Jirô est un passionné. Il rêve de voler et concevoir le plus beau des avions. Il se voit tout d’abord pilote mais sa mauvaise vue l’en empêche. Il devient ainsi ingénieur et au fil des années relève avec brio les challenges qui lui sont proposés. Il rêve régulièrement du concepteur italien Giovanni Caproni, qui vient le visiter et l’inspirer en songes, au cours des rares passages fantastiques du film.

Le film est en dehors de cela beaucoup plus réaliste que les précédents films de Miyazaki. Il décrit ici de manière quasi-documentaire le Japon d’entre deux guerres, sa dépression, et met en scène de façon abasourdissante le séisme de Kanto de 1923.

C’est pendant cet événement que Jirô rencontre Nahoko, celle qui deviendra sa femme bien des années plus tard. Les rencontres sont à chaque fois très romantiques. La première se fait dans un train. Nahoko rattrape le chapeau de Jirô d’un wagon à l’autre. Ils ne s’échangent que quelques mots : "Le vent se lève, il faut tâcher de vivre" (en français dans le texte et la bouche pâteuse des personnages japonais), un des derniers vers du poème "Le Cimetière marin" de Paul Valéry. Le poème est sorti en 1920, soit trois ans auparavant. Un an avant si l’on considère la revue "Charmes" publiée en 1922. Le poème a été inspiré à Valéry par l’observation du cimetière de Sète mais aussi par une volonté d’exercice rythmique non loin d’un jeu sensuel. C’est un poème sur la conscience du mouvement des corps et de la nature, notamment la mer. Parlant quand on pense au Japon, pays et corps régulièrement victime de Tsunamis. La production du film a été troublée par les tsunamis du 11 mars 2011 qui ont touché les côtes du Japon.

Dans le film, le séisme intervient juste après la première rencontre de Jirô et Nahoko. Jirô vient en aide à la jeune fille et à sa mère puis part sans demander son reste. Ce n’est que plusieurs années plus tard qu’ils se retrouvent dans un centre de repos suisse. Jirô est éprouvé psychologiquement et physiquement par son travail d’ingénieur. Les enjeux sont si importants à l’aube d’une nouvelle guerre. Nahoko vient soigner sa tuberculose. Les deux jeunes gens se retrouvent et, après quelques ballades et une séquence de jeu avec un avion en papier, décident de sceller leur union.

Mais le travail de Jirô est si intense qu’il passe devant sa vie personnelle. Il ne peut ainsi être au chevet de sa femme. Contre l’avis médical, la jeune femme décide de vivre ses ultimes moments auprès de son mari qui planche d’arrache-pied sur les dernières étapes de la création de l’avion de guerre commandé. Les moments sont précieux. Par pudeur, par amour pour son mari qui réalise son rêve, elle décide de repartir vers le centre de santé dans la montagne pour y finir ses jours et ainsi ne pas s’imposer auprès de lui. Une des dernières séquences assez dure du film, bien loin de nos mentalités occidentales.

Miyazaki avoue avoir eu du mal à parler de la vie d’un homme qui construisit un avion de guerre. Cela le hanta pendant une bonne partie de la production. Il trouva sa solution en faisant intervenir des phases de rêves, dans lesquelles les deux ingénieurs (Jirô et son idole Giovanni Caproni) échangent leurs ambitions, leur façon de voir un monde meilleur (avec des avions capables de transporter de nombreuses personnes) et tout simplement leur volonté de créer de beaux appareils volants.

Le film, officiellement le dernier de Miyazaki, est un cri du cœur de son auteur. Il se termine avec l’aube d’un nouveau rêve accompli par son personnage principal, un rêve qui lui demanda beaucoup de sacrifices (mais aussi celui des autres, à l’image de son épouse qui disparait rayonnante, au-revoir bouleversant). Ce personnage à l’attitude posée et à la voix habituellement monocorde, Jirô/Miyazaki, pleinement reconnaissant, remercie ceux qui l’aiment d’une voix déchirante et les larmes aux yeux. Et c’est à nous d’avoir les larmes aux yeux et de le remercie pour tous ces rêves qu’il nous a fait partager. Merci.

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